Page 171 - Acccueillir la petite enfance - programme éducatif - Québec
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La régulation des émotions
Les jeunes enfants passent graduellement de la régulation des émotions, c’est-à-
dire la capacité, soutenue par l’adulte, de composer avec elles et de les modifier, à
l’autorégulation, à la capacité de les réguler par eux-mêmes 342 .
« La régulation émotionnelle doit d’abord être comprise du point de vue de l’individu
qui gère ses émotions, et plus précisément des buts qui lui sont propres 343 . » Par
exemple, le jeune enfant qui utilise délibérément les cris pour obtenir ce qu’il désire
le fait probablement parce que cette stratégie lui permet d’arriver à ses fins dans
certains contextes, bien qu’elle soit jugée inadéquate au SGEE.
Lorsque l’adulte prend l’enfant dans ses bras pour l’aider à calmer ses pleurs, lui
offre un objet à manipuler pour le distraire de sa colère de ne pouvoir aller dehors, lui
explique pourquoi il ne peut pas grimper sur la commode même si l’idée lui semble
hautement excitante, il ou elle l’accompagne dans la régulation de ses émotions.
Un jeune enfant peut gérer son émotion en s’autoréconfortant. C’est ce que fait
Marion lorsque, au départ de son parent le matin, elle prend sa petite couverture et
sa peluche. L’enfant peut également transformer l’expression de son émotion, par
exemple sourire dans une situation anxiogène, pour se convaincre et convaincre les
autres qu’il est heureux 344 .
Il arrive souvent que la régulation des émotions repose sur des stratégies de résolution
de problème. L’enfant peut alors renoncer à son objectif (ne plus tenter de monter
dans la glissoire, par exemple), le transformer (comme choisir un autre partenaire de
jeu), choisir un nouvel objectif (se joindre au groupe qui fait la course) ou changer
son interprétation des causes de la situation (se dire, par exemple, qu’il ne voulait
pas glisser, de toute façon !). Certains enfants tentent également de transformer ou
d’éviter une situation afin d’esquiver la surexcitation. Ainsi, Gilbert, qui est sensible au
bruit, coupe le son de l’appareil audio ou s’éloigne du groupe lorsque celui-ci se met
à danser.
La capacité de résoudre des problèmes interpersonnels est également un moyen
efficace de réguler ses émotions en ce qu’elle permet de trouver des options de
remplacement et des compromis. Par exemple, lorsque Marie-Claire réalise qu’elle
aura beaucoup de mal à dissuader sa partenaire de lui laisser le rôle de la bonne fée,
elle suggère d’ajouter au scénario une princesse qu’elle personnifiera avec plaisir.
L’enfant aurait pu aussi chercher l’aide de l’adulte, montrer de l’agressivité ou encore
se faire plus insistante. Ces quelques exemples témoignent bien du potentiel des
situations de jeu pour apprendre à autoréguler ses émotions. Toutefois, pendant la
petite enfance, l’enfant a souvent besoin de soutien pour développer ces capacités.
Il est important de se rappeler l’importance d’accueillir les émotions de l’enfant. Leur
régulation ne devrait pas conduire celui-ci à les réprimer ou à les taire.
164 Chapitre 5